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Publié le 22 Octobre 2022

 

Ile du Levant, le 22 juillet 1979

Docteur

Faire la "chronique" de la boulangerie de l'île du Levant, c'est "sentir un creux dans l'estomac et une brûlure dans les yeux"... puis joindre les mains et dire au Père : "Donnez-nous tous les jours, le pain dont ils ont besoin !"

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c'est Madame et Monsieur Sadaune qui la firent construire sur les conseils des Dr Durville. J'insiste sur "les conseils" car le four a été conçu pour faire du pain complet : construction qui reste encore un handicap pour tout le reste.

NATURISME n°229 du 10 novembre 1932 - Coll. Jacquier


Madame Sadaune était venue avec la douce illusion de sauver son mari de l'alcoolisme par la pratique préconisée de la méthode "naturiste" des Docteurs qui mettaient l'accent sur la discipline de la nourriture.. le "nu" n'étant même pas toléré... Hélas, le bar de la Pomme d'Adam lui a enlevé tout espoir. La perte d'une fillette brûlée vive les a fait fuir l'île pendant plusieurs années...*
Je ne sais quelles étaient les conditions de location d'une gérante, Francine, qui avec un jeune boulanger a procuré le pain aux habitants surtout pendant l'occupation, mais j'ai assisté en 1949 à son expulsion, ayant laissé partout des dettes dont Mme Sadaune, devenue veuve, était responsable...
C'est son fils, puis un gendre qui pendant 2-3 ans nous ont fait un mauvais pain.

Puis est arrivé un charmant jeune couple, propres, travailleurs. Bon pain et gâteaux... Ils n'ont pu tenir qu'un an. Sont partis plus pauvres que quand ils sont arrivés...

C'est un couple âgé, sorte de "retraités" qui a pris la suite. Bon boulanger. Il nous a fait du bon pain et a employé ses loisirs à la pêche...

Madame Sadaune a enfin, vers 1957, réussi à vendre son fonds et les murs. Ce sont des boulangers d'Hyères qui ayant vendu leur magasin ont pu payer comptant.
A nouveau bon pain et bon gâteaux. Hélas, la charmante boulangère, (une amie chère) était venue avec le même espoir que Mme Sadaune...Inutile de relater les drames causés par la proximité de la Pomme d'Adam...

En fin de compte, en attendant de trouver à vendre , ils ont pris un gérant, dont la femme est tombé amoureuse d'un marin et a fini de se suicider...

Ce sont alors les "Colins" qui vous avez connus qui ont pu acheter le fonds avec promesse d'acheter les murs...qu'ils n'ont jamais pu réaliser...Je ne sais pas si vous êtes au courant du drame qui a précipité le départ des Colins... Toujours est il qu'ils ont cédé le fonds aux boulanger actuels, règlement par traites..

Et c'est Madame Charraix qui a acheté les murs...Il y aurait beaucoup à dire, mais il est plus prudent de se taire..
Croyez, Docteur, à l'assurance de mes sentiments honnêtes

Elise Damiat-Arbogast

 

Source : Archives Philippe Fourneau

 

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Extrait page 72 "Héliopolis, histoire d'un village expérimental devenu un jardin d'essais" F. Capoulade / H. Goldet SAH 2012

* Un drame :
Une jeune fille est morte, brûlée, en juillet 1934. C’est Jacqueline Sadaune, la fille du boulanger. Elle était au sous-sol de la Pomme d’Adam. Elle faisait la lessive, avec une lessiveuse. Elle a voulu rajouter de l’eau et elle s’est trompée. Elle a pris un bidon plein d’essence le croyant plein d’eau…
Elle était employée par Le Carpentier comme secrétaire et pour s’occuper de son magasin d’alimentation. 
Le Carpentier est en mauvais termes avec Durville. Alors on va chercher un médecin vacancier, sur la plage de Rioufrède même si Durville est chez lui au Fort. On attendra une demi-heure pour faire une piqûre de morphine à la jeune fille. Le temps pour le médecin de revenir et de passer chercher le nécessaire au Fort. Elle meurt à l’hôpital, quelques jours plus tard.  La mère de la jeune fille reproche durement à André Durville la mort de sa fille. Si on avait de l’eau dans les robinets, sa fille ne serait pas morte. C’est vrai, mais insuffisant. Il n’y aura pas d’enquête.

 

 

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